Haïti : Gros mouvement de protestation contre l’insécurité et les violences des gangs
- Ecole Medias
- 3 avr.
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Dernière mise à jour : 13 avr.
Ce mercredi des milliers de personnes ont investi les rues de Port-au-Prince pour protester contre la recrudescence de l’insécurité et dénoncer le pouvoir en place, qui selon plus d’un « ne fait rien pour contrecarrer les bandits ». C’est la deuxième grande mobilisation populaire déclenchée en seulement deux semaines.
Un vent de révolte souffle sur le pays. Pancartes à la main, armés de bâton ou machettes pour certains, plusieurs centaines de manifestants ont occupé certaines rues de la région métropolitaines de Port-au-Prince. Notamment les routes de Canapé-vert, Bourdon, Pétion-Ville ou encore Delmas. Des barricades enflammées ont été érigés sur plusieurs axes stratégiques, pour protester contre l’exacerbation de l’insécurité et des violences des gangs « qui contrôlent près de 85% de la capitale. »
Très remontés, les protestataires ont scandé des propos hostiles contre le gouvernement et dénoncé la passivité des autorités face à la situation. « Les bandits continuent de massacrer la population alors que les dirigeants ne foutent rien. Qu’ils se cassent ! » S’offusque un manifestant, très en colère. Cette mobilisation a entraîné une paralysie quasi-totale des activités dans la capitale. Les commerces et les écoles ont été fermés par crainte de débordements. Révoltés, les manifestants se sont dirigés vers les locaux du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) et de la primature. Mais la police s’est interposée.
La manifestation a été violemment réprimée
Des heurts se sont éclatés entre la police et les manifestants. Les forces de l’ordre ont fait usage de bombes lacrymogènes et des tirs de sommation pour disperser la foule qui tentait de s’approcher de la villa d’accueil, QG du gouvernement. Les protestataires ont vivement critiqué le comportement des policiers. Ils déplorent un usage disproportionné de la force et la brutalité des agents de maintien d’ordre. « Quand c’est le peuple qui manifeste, les policiers ne tardent pas à nous bombarder de gaz lacrymogène et de balles. Mais ils sont où quand les bandits tuent, violent, pillent et brulent les maisons de la population ? » S’interroge un protestataire, indigné.
Un sentiment que partage Ulysse Jean Chenet, coordonnateur général du Mouvement Point Final (mouvement de protestation populaire contre l’insécurité) qui condamne « l’attitude des policiers qui empêchent à la population de s’exprimer convenablement contre les autorités en place qui refusent de répondre aux aspirations du peuple ». Ce mouvement de protestation vise à exprimer l’exaspération des citoyens face à l’insécurité et l’impuissance des autorités vis-à-vis des gangs qui sèment la terreur.
La situation sécurité du pays se détériore de plus en plus
Les bandes armées continuent de terroriser la population. Depuis plus 4 ans, les bandits imposent leur loi un partout dans la capitale et dans quelques villes de provinces. Selon l’OIM (Organisation internationale pour les migrations), les violences des gangs poussent « 60 000 personnes à fuir leur demeure, en moins d’un mois (entre le 14 février et le 5 mars 2025) ». Augmentant ainsi le nombre des déplacés qui dépassent la barre d’un million de personnes. Un chiffre qui a été multiplié par trois en une année.
La terreur des gangs a déjà fait des centaines de victimes en Haïti. Selon l’Organisation des Nations Unies « Seulement en 2024, 5 600 personnes ont été tuées et 2 212 blessés recensées en cette même période ». Des chiffres très alarmants mais qui ne reflètent que partiellement la situation réelle sur place, a en croire le Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. Selon Volker Türk « Ces chiffres ne suffisent pas à rendre compte des horreurs absolues perpétrées en Haïti, mais ils montrent la violence incessante à laquelle les gens sont soumis. »
Une situation qui plonge le pays dans une catastrophe humanitaire sans précèdent. Selon les calculs des Nations unies, « 5,4 millions de personnes ne mangent pas à leur faim dans le pays dont deux millions souffrent de famine. » Ajouté à cela, la suspension de l’aide humanitaire américaine par Donald Trump vient envenimer la situation davantage.
Malgré la présence de la force multinationale en Haïti depuis le 25 juin 2024, la situation sécuritaire du pays continue de se détériorer. La coalition des gangs armés « viv ansanm » poursuit son offensive sur divers territoires du pays. Apres Solino, delmas 30, kenskoff, c’est autour de la ville de Mirebalais (dans le centre du pays) de subir les assauts des bandits, le 31 mars dernier. Contraints ainsi des centaines d’habitants à fuir. Une situation qui montre l’incapacité des autorités à endiguer ce phénomène.
Ne sachant à quel saint se vouer, les rivrains de la zone metropolitaine de Port-au-Prince expriment leur colère et leur ras-le-bol à travers des manifestations. « Nou fout bouke… ! [Traduction : On n’en a marre !]» Lâche manifestant, très furieux. Malgré l’interposition des forces de l’ordre, les protestataires n’entendent pas lâcher du lest. Selon les organisateurs, « la mobilisation de ce mercredi 2 avril (la deuxième en deux semaines) n’est que le début d’un vaste mouvement de protestation populaire, baptisé : Mouvement Point Final ».
RÉDACTION : Widelove NUMA
RÉVISÉ & CORIGÉ PAR : Rodly SAINTINÉ
© : ÉCOLE DES MÉDIAS - 2025
© PHOTOS : Ralph Tedy ÉROL
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